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Témoignage touchant d’une femme qui s’occupe de sa mère atteinte d’Alzheimer

 » Je ne suis plus centrée sur moi-même, m’occuper de ma mère aux prises avec sa maladie est devenu pour moi un acte d’amour ordinaire. »

 » Si vous m’aviez dit il y a 5 ans que j’aurais à changer les couches de ma mère, j’aurais suffoqué rien qu’à l’idée. Mais quand c’est arrivé je me suis rendu compte que ce n’est pas aussi insurmontable que je l’imaginais. et cela s’applique à tout ce que l’on fait lorsqu’on s’occupe d’un être cher. Ce qui me paraissait impossible en théorie est rendu possible par la force de l’amour. C’est comme si une batterie sans limites d’affection avait été chargée par les 40 années durant lesquelles elle s’est occupé de moi, et maintenant que je dois rendre la pareille une énergie nouvelle illimitée et superbement efficace s’est déclenchée en moi.

Pour prendre soin de ma mère nous nous sommes partagées la tâche mes sœurs et moi, mais affirmer que je m’en charge à temps partiel ne serait pas approprié, il m’arrive aussi de m’en occuper à temps complet.

Lorsque je prends mon vol tous les deux mois pour prendre mon » tour » de garde , je suis d’abord terrifiée par la possibilité qu’elle ne me reconnaisse pas en arrivant, mais je fais en sorte de surmonter mes angoisses.

Premièrement parce que le processus de progression de la maladie d’Alzheimer n’évolue pas en courbe descendante uniforme, mais plutôt en ligne descendante et irrégulière. Elle a des bons comme des mauvais jours comme tout le monde. Si elle est perturbée aujourd’hui, elle ne le sera peut être pas autant demain.

Deuxièmement parce que je sais dorénavant qu’un horrible accueil que j’aurais imaginé serait toujours plus dramatique que les faits qui se produisent concrètement.

Je me rends compte également que comme je n’ai pas élevé d’enfants je vis cette expérience comme un challenge excitant et gratifiant, est-ce  correct d’user de ces termes? C’est l’aspect pratique qui prend le dessus.

Il y a énormément de travail entre le lavage, le rangement, le repassage, les courses la cuisine et les petits pleurs et surtout l’anticipation perpétuelle d’un besoin ou d’un danger. Je n’ai jamais eu quelqu’un qui dépende entierement de moi.

Vouer un amour inconditionnel est un plaisir que j’avais complètement oublié dans le cynisme de mes 40 ans. Bien sur je ferais n’importe quoi pour voir sa démence disparaître. Mais cela ne se peut  alors je fais au mieux avec la situation telle qu’elle est. Cela m’a appris davantage sur moi-même et le monde qu’aucune autre situation vécue auparavant. C’est un numéro d’équilibriste auquel nous nous exerçons ensemble au fur et à mesure que nous avançons. Et c’est aussi  excitant et satisfaisant, qu’impossible de s’y préparer.

Nous tamisons le sable en quête d’or tous les jours, puis seau après seau, vidant ce sable empli de frustration, l’occasionnelle pépite est plus que suffisante pour nous nourrir.
Elle peut soudainement avoir un moment de lucidité absolue. Parfois ils se manifestent comme des tessons qui ressurgissent de la femme emprisonnée a l’intérieur,  transperçant le brouillard de cet oublie pharmaceutique, menaçant ou suppliant.
En d’autres occasions,c’était comme si ma mère d’il y a 10 ans était venue me rendre visite un matin, pour partager une tasse de thé, prendre des nouvelles et me remercier de s’occuper d’elle.
Il y a trois semaines j’étais dans le pays des tromperies chantant et dansant sur la scène Londonienne. Et ce matin j’étais dans la douche toute habillée à laver ma mère nue et en larmes suite à un incident de transit. Ce décalage me pousse à travailler sur mes capacités d’adaptation comme jamais je n’ai eu à le faire dans le passé. Il y a une réplique dans l’un des films préférés de ma mère qui dit :  » quand vous êtes secretaire dans une  brasserie, il est difficile de faire croire que vous faites autre chose, tout tourne autour de la bière. » Quand je suis avec ma mère je ne peux être autre chose que son enfant. Je suis l’acteur de soutien de son acte III. Et elle est au rôle principal de mon acte II. Les événements de la vie sont incontournables et si attendrissants.

Je suis toujours surprise quand les gens disent «vous êtes si courageuse» ou «je ne sais pas comment vous gérez ». Nous prenons soin de nos jeunes, nos malades et nos personnes âgées depuis des millénaires – beaucoup plus longtemps que l’utilisation de la monnaie ou la composition de symphonies, ou même de croire en des divinités. Ce que je fais est, en fait, entièrement ordinaire. Tout ce qui était nécessaire était de dégager mon hyperactivité, mon égocentrique, et ma mentalité  du 21e siècle et permettre que cela se produise. C’est ce qui est dans notre ADN: l’amour et la compassion et non pas l’égoïsme, l’envie, la haine, ou le désir de profit. Lorsque vient le moment de devoir faire le pas tout devient limpide.

Demain, c’est la fin du » Mois national de sensibilisation à la maladie d’Alzheimer  et du  » mois national du soutien familial . Nous devons en parler. Nous devons partager nos histoires, sans honte. Partager nos histoires est une thérapie pour le soignant et un soutien individuel pour les autres dans un poste similaire. Il permet de développer une compréhension collective et un plan de stratégies d’adaptation. Cette année seulement au Royaume-Uni selon les estimations, 116 000 personnes devront quitter ou ajuster leur travail de manière significative afin de prendre soin d’une personne atteinte de démence. Se taire, et cacher la vulnérabilité des personnes âgées, c’est condamner des millions à la torpeur et à la tristesse d’attendre la mort dans l’isolement.

Il y a encore des pépites d’or que l’on trouve dans la plus profonde, la plus épaisse boue. Ne les manquez pas en regardant trop loin ou trop en avant.

 

Source : theguardian.com

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